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Marcher pour penser

Des kilomètres et quelques pensées plus loin...

ballade au kluit put à Halluin

Remous ménagent

- 648 kms -

La manière parfois importe plus que la matière. Même si très souvent la forme sans le fond ne produit que des apparences qui très vite s'estompent, il lui arrive de dépasser ce qui la fonde. Il en va ainsi du don. La façon de donner et la manière de recevoir sont aussi importantes que l'objet donné, si ce n'est plus. Le don est ainsi fonction avant tout de la relation formelle qui lie le donateur et le donataire. Je peux donner tout l'or du monde, si celui le recevant y accorde très peu d'importance ou un désintérêt à peine dissimulé, la transaction gratuite dès lors l'emporte sur le don. Il en est de même si celui recevant la chose donnée manifeste un enthousiasme qui déborde de loin mes arrières-pensées intéressées. Le don repose sur la gratuité, non à propos de ce qui change de main, mais de l'absence d'intérêts de part et d'autre des participants à l'échange. C'est pourquoi il ne faut pas confondre la générosité avec le don. Je peux être généreux en aidant mon prochain sans forcément lui donner quoi que ce soit. La générosité et le don sont proches sur le fond. Il y a en revanche comme une forme de supériorité chez celui se montrant altruiste vis-à-vis du bénéficiaire que l'on ne trouve pas dans le don. Évitons ainsi d'être seulement généreux quand il s'agit de donner.

Le 15 février 2025

ballade à pied du côté de la Lys à Menin

- 642 kms -

On entend dire, ici ou là, que si tout se vaut, alors rien ne vaut. Nous manquerions ainsi plus d'idéaux que d'idées. Retour au sacré ! L'appel est lancé pour remettre un peu d'ordre dans ce bazar quotidien. Retour aux valeurs, les vraies, en supposant que certaines soient fausses ou faibles. La religion, le travail, la famille, la nation plus que la patrie, reprennent quelques couleurs sans forcer. C'est que les valeurs reposent. Plus besoin de se creuser la tête pour donner du sens là où il n'y en a aucun. Le sacré rassure aussi. Plus besoin de douter. Tout est instauré, prescrit. Les fondements trônent sur l'incertitude. Le sacré enfin est séduisant. On y met volontiers de la beauté pour faire battre les coeurs. Ou alors flatte-t-il quelques égos en laissant à penser que s'y assujettir démontre une force de l'âme. Nous voici donc prêts à nous abandonner. Je peux bien marcher autant que je veux, la voie est tracée. Plus de risque de se perdre. Plus moyen non plus de découvrir ce qui plus tard peut avoir la valeur que je lui donne. Tant pis. 

Le 14 février 2025

Sans recours

- 636 kms -

Pour ce qui est de le connaître, reconnaissons que Dieu n'est guère coopératif. On peut bien parcourir des distances à n'en pas finir pour le rencontrer, toujours nous laisse-t-il sur le bord du chemin. Nombreux sont ceux pourtant qui empruntent des sentiers ou quelques voies mystérieuses pour l'approcher. Nombreux sont ceux aussi qui tentent vainement de l'expliquer. La raison est pourtant aussi limitée que le sont nos pas pour démontrer quoique ce soit à son sujet. C'est perdu d'avance. Trouver une cause à Dieu revient à le nier. S'il n'est pas la cause de lui-même, cela signifie que quelque chose lui est antérieur, donc supérieur. Dieu alors ne serait plus lui-même. Mais en même temps, comment envisager qu'un être, qu''une entité, qu'une chose n'ait point de cause. Peux-t-on penser que le cause et la conséquence soient confondues ? Existe-t-il une causalité en dehors de l'espace et du temps au sein duquel nous évoluons ? Peut-être Dieu nous a-t-il permis de l'entrevoir sans qu'il n'ait à se révéler ? N'est-ce pas là un bienfait que de ne jamais pouvoir connaître ce que l'on espère ? Au moins cela nous fait-il marcher. L'essentiel est moins d'arriver que d'être en chemin. Rendons grâce à Dieu, non pour exaucer quelques voeux prosaïques ou garantir une éternité que l'on ne peut imaginer sans son secours, mais pour ne jamais se dévoiler Ainsi puis-je avancer sans cesse en l'espérant sans qu'il me soit possible de l'atteindre. C'est toujours mieux que de rester planter dans une impasse.

Le 13 février 2025

randonnée à pied le long de la Lys Halluin

Résurrection

- 636 kms -

L'angoisse est une peur sans objet. J'ai peur des insectes. J'ai peur de mon voisin. J'ai peur du qu'en dira-t-on. J'ai peur de perdre ma fortune, que je sois riche ou chanceux. J'ai peur d'être seul parmi les autres. J'ai peur que mon corps déclare forfait. J'ai peur de la mort...Je suis en revanche angoissé par je ne sais quoi. L'angoisse m'étreint d'ailleurs sans prévenir, tout comme elle disparaît sans adieu, pour revenir par la suite sans convocation ni avertissement. Ainsi se joue-t-elle de moi, ou avec moi, en s'emparant de mon être sans coup férir. Je ne lui résiste pas car elle est là lorsque j'en prends conscience. Que faire alors ? Soit je l'accepte sans l'accueillir, soit je trouve quelques subterfuges pour m'en détourner. Je suis prêt aussi à lui céder une bonne part de ma liberté pour qu'elle se taise. Car même si elle est sans objet, l'angoisse n'est pas sans raison. Elle me revoie à ma condition de celui n'ayant pas d'autre choix que de choisir. Aussi peut-on dire que j'ai peur de faire de mauvais choix, et que je suis angoissé à l'idée de tous les choix qu'il m'est possible de faire. Dieu merci, il reste la soumission pour me rassurer.

Le 12 février 2025

marche à pied plage de saint-cécile haut-de-france

- 631 kms -

Dieu est mort...ou pas. Dieu est tout puissant...ou pas. Dieu est bon...La croyance est salutaire dans le sens où avec elle, tout est possible. Je peux affirmer avec la plus grande ferveur une chose aujourd'hui, et son contraire le lendemain avec aplomb. Ainsi le croyant est-il plus libre que ne l'est le sachant. Je sais d'une chose sa taille, sa couleur, sa fonction, sa composition. Je sais tout cela et sauf erreur de ma part, je ne peux pas en dire l'opposé. La vérité écrase toute possibilité alors que la croyance la nourrit. Plus je crois en Dieu, plus il est possible qu'il n'existe pas. Plus je crois qu'il n'existe pas, plus est-il possible que Dieu existe. La croyance laisse à la liberté une place que n'admet pas le savoir. C'est aussi ce qui fait sa fragilité. Je suis libre de croire ou de ne pas croire en quoi que ce soit, au risque d'abuser de la liberté jusqu'à son épuisement. C'est alors que je prétends savoir bien qu'il ne soit question que de croire. Croire que l'on sait nous pousse vers la réclusion. Heureusement, savoir que l'on croit nous libère.

Le 11 février 2025

Espoir

lever de soleir sur la plage de camier sainte-cécile

- 624 kms -

La seule chose qui ne change, c'est le changement lui-même. Rien ne dure hormis le fait de durer différemment. Il en est ainsi du vivant comme de l'inanimé. Tout est en devenir, continuellement, laissant à penser qu'un sens commande toute transformation, qu'une intention serait à l'origine de ce que nous serons plus tard. On admet moins que tout puisse changer sans arrêt et sans raison. Le destin vient à notre secours. Certains y mettent même de la providence. Si tout doit changer, autant s'en accommoder avec des explications qui consolent. Ainsi croit-on que l'on devient ce que l'on est à l'aune de ce qui nous précède, une essence peut-être qui contiendrait en elle-même ce que nous serons. Voilà qui rassure. Si c'est pour changer, autant garder la main sur le point de départ. Il faut toujours que l'on cherche à se fixer quelque part, à trouver des origines, à démontrer ce qui nous échappe. L'absurde nous est vraiment insupportable.

Le 10 février 2025

Encore un effort !

- 624 kms -

Au voleur ! Au voleur ! Sans cesse sommes-nous tant victimes que coupables des forfaits assaillant ce que nous avons de plus précieux : l'attention. Combien de fois par mégarde, ou par paresse, sommes-nous si peu attentifs. Combien de fois par distraction abandonnons-nous notre attention à d'autres qui en usent à volonté. Mais aussi sommes-nous responsables de détourner l'attention de notre entourage afin d'en faire un public prêt à satisfaire notre égo. Notre attention est même devenue une marchandise prête à être consommée, donc à enrichir. Une économie s'est développée autour d'elle, renforcée avec les nouvelles technologies toujours prêtes à nous séduire un peu plus. Nous leur prêtons notre présence au monde en leur cédant notre attention. Coupable et victime à la fois disais-je. Coupable de ne pas leur résister, victime de leur attrait. Négligence. Irresponsabilité. Notre attention est à la peine. L'enjeu pourtant est de taille car c'est elle qui construit notre présent.

Le 8 février 2025

randonnée pédester halluin vallée de la lys haut-de-france

Arrivée ou départ

- 616 kms -

Ne pas prendre ses rêves pour des réalités. Prendre le réel comme il vient. Autant de conseils entendus ici ou là. Plutôt que de chercher à posséder plus, pourquoi pas désirer moins et ainsi s'épargner l'espoir et la crainte. Les deux font la paire ! Pas d'espoir sans crainte, pas de crainte sans espoir. Ce couple infernal nous en ferait voir de toutes les couleurs ! Ce n'est pas faux. Mais ce qui l'est est de considérer le désir comme leur principal allié. C'est bien plus l'ennui qui nous conduit à espérer mieux tout en craignant d'y parvenir. Bienheureux qui sait s'ennuyer.   

Le 7 février 2025

- 610 kms -

Rendons grâce aux étoiles. Elles exercent sur nous un pouvoir bienfaisant sans même nous commander. Les étoiles sont pour nous salutaires en nous rappelant que nous sommes bien peu de chose dans l'Univers tout en nous élevant. Elles nous apprennent que nous ne sommes pas le centre de tout. Ainsi, ces petits points lumineux comme accrochés dans la voûte céleste, gains de poussière à l'échelle du monde, sont capables sans effort de nous remettre à notre place. Les étoiles ne sont pas grand-chose dans l'immensité cosmique, et il suffit de les observer pour comprendre que nous ne sommes pas plus qu'elles. Comme elles, nous avons un début puis une fin qui nous attend. Mais comme elles, nous sommes capable de nous dépasser. Les étoiles en se jouant du soleil sont plus brillantes que jamais, et avec elles nous nous dépassons quand leur brillance nous inspire.

Le 6 février 2025

randonnée marche paris vers clichy

Quand le ciel résiste

randonnée pédestre à linselles

- 596 kms -

Un pied. Puis le second. Me voici debout. Quelques secondes pas plus, et déjà le doute m'assaille. Comme si tapi la nuit durant dans un coin de la chambre, il surveillait mon sommeil, prêt à bondir une fois les yeux ouverts. Pourtant, hier encore, le doute je l'ai vaincu. Une journée d'agitations a eu raison de son emprise matinale. Mais à chaque fois il reprend son souffle dès la nuit venu et revient conquérant chaque matin ou lorsqu'il commerce avec l'insomnie. Sa force est même décuplée quand le sommeil se fait la malle avant l'heure. La nuit peut bien être blanche, nos préoccupations se teintent d'un noir profond quand l'insomnie nous gagne. Son emprise est si forte qu'elle nous oblige à nous lever avant l'aube. Le doute alors est à son affaire si on ne trouve rien à faire. Il a gagné du temps et il en jouit. Les secondes s'étirent et ainsi le matin s'éloigne un peu plus. On peut tenter de lui opposer le divertissement mais ses ressources sont limitées quand tout sommeille. Reste à attendre le lever du jour pour prendre sa revanche. Une fois mes chaussures lacées, le doute se lassera. Il s'en retournera dans la chambre, s'apprêtant pour le prochain matin.

Le 2 février 2025

- 586 kms -

Qu'est-ce qui peut pousser quiconque à prier ? La foi répond-on sans discourir. Cette réponse toutefois n'est pas complète. Elle révèle ce qui anime la prière, ce qui l'entraîne, mais ne dit rien de sa destination. Beaucoup objecteront que la prière n'a qu'une seule issue, qu'elle est une parole tantôt emphatique, tantôt murmurée, voire silencieuse, dirigée vers le Très-Haut. Peu importe qu'il s'agisse de Dieu, du Tout-Puissant, du Seigneur, du Père éternel. Il peut même s'agir d'une bonne étoile, la sienne en l'occurence par le seul fait que l'on s'adresse à elle en priant. Le Très-Haut en ne se dévoilant jamais peut recevoir tous les noms qu'on lui prête avec la prière, sauf un peut-être : le hasard. Qui en effet prie le hasard ? Tout au plus peut-on s'en remettre à lui, mais la prière n'a rien à voir dans cette histoire. Il n'y a rien à demander au hasard, rien à se faire pardonner, rien à en espérer. Cette indifférence le rend insupportable pour certains et ainsi la foi et la prière viennent-elles à leur secours. Prier donne du sens là où le hasard n'accorde aucune intention, ni attention. Car même si le Très-Haut ne nous écoute pas, au moins nous aura-t-il entendu avec la prière. Ce n'est que partie remise. La prière est résistante. Elle est commode aussi. On peut faire dire ce que l'on veut au silence.

Le 1er février 2025

randonnée pédestre sur les bords de Lys à Halluin

Le réel et son trouble

- 579 kms -

Quand je dis d'une chose qu'elle est belle, je parle bien plus de moi que de la chose elle-même. Et il n'est pas rare de passer du beau au bon, considérant que si la chose est belle, elle ne peut être mauvaise. La morale trouve ainsi des raccourcis accommodants. Dire d'une chose qu'elle est belle n'est pas seulement un avis. Elle est une expression de soi. C'est pourquoi je n'apprécie guère être contredit lorsque je m'épanche sur ce que je pense être seulement une question de goût. D'ailleurs, j'ai beau me dire que tous les goûts sont dans la nature, ou alors à chacun son mauvais goût, je n'en suis pas moins affecté lorsque mes penchants ne sont pas partagés. La chamaillerie alors n'est pas très loin. La colère la suit également. Se disputer pour une couleur, se quereller pour une forme, tout cela peut bien sembler futile une fois les tensions éteintes. On se demande comment on en est arrivé là, et dans le meilleur cas on repart avec une poignée de main. Notre surprise n'est pas feinte. Elle se trompe simplement d'objet. Le goût est une expression de soi et surtout de sa condition sociale. L'objet de la dispute est moins la couleur que les inégalités qui s'expriment selon qu'elle nous attire ou pas. Le goût a la saveur de ces inégalités. Heureusement parfois un coucher de soleil sait mettre tout le monde d'accord.

Le 31 janvier 2025

randonnée pédestre vers Menin Belgique

Songeries matinales

randonnée pédestre plage de camiers

Illusions

- 573 kms -

Quand on veut, on peut ! Rien ne saurait nous arrêter, sauf notre volonté pense-t-on. Le décor est planté. Tout est prêt pour culpabiliser. Si j'ai échoué, ce n'est pas que les moyens me manquaient ou que je les ai perdus, ou alors que les circonstances s'étaient liguées contre moi. C'est tout simplement parce que je ne voulais pas assez, ou mal. Je suis donc le seul responsable. La sentence est prononcée. Implacable. Indiscutable. Quand on veut, on peut ! La sentence a l'avantage de couper court à tout ce qui dérange. Dis seulement une parole et je serais guéri laisse entendre la Bible. Alors voilà, c'est dit. Quand on veut, on peut ! Suis-je pour autant guéri ? Rien n'est moins sûr. La sentence n'est pas un remède. Elle ne va pas au-delà de la charge qu'elle porte. Certes, elle déstabilise, mais ne renverse rien. Elle se cache aussi derrière des formules toutes faites. Quand on veut, on peut ! Finalement, à peine accuse-t-on. C'est surtout réagir sans réfléchir. Pourtant, ne serait-ce pas mieux que d'affirmer l'inverse : quand on peut, on veut ! Non pas qu'il s'agisse de trouver les moyens pour satisfaire toute volonté, mais de s'exercer à mieux vouloir. La volonté croit-on nous appartient. Elle recèle pourtant bien des mystères.

Le 30 janvier 2025

- 568 kms -

Savoir être indifférent à l'indifférence du monde, voilà un apprentissage des plus ardu mais non moins salutaire. Prendre de la distance n'est pas simple tant nous sommes attachés au réel, ceci d'ailleurs dès nos premiers instants. Nous ne sommes pas jetés au monde à la naissance, mais plus tard, quand nourrisson nous laissons la place à l'enfant. Nous faisons alors corps avec le sein maternel et soudainement nous en sommes détachés. La rupture est brutale, traumatisante. Elle nourrit l'inconscient qui bientôt sera notre guide. Nous passerons aussi le restant de nos jours à compenser ce détachement originel. Subterfuges. Artifices. Échappatoires. Tous les moyens sont bons. On prétextera la quête du bonheur en agissant de la sorte. Ainsi nos échecs seront pardonnés car personne ne sait comment s'y prendre pour être heureux. Il est toutefois regrettable que de ne pas apprendre à être indifférent à l'indifférence du monde puisque le réel n'a aucun sens hormis celui qu'on lui donne.

Le 29 janvier 2025

- 568 kms -

Le bonheur, vastes questions ! Comment l'approcher, l'atteindre, le contenir, le soutenir, le partager ? Ne pas y penser répondront certains. Le questionner suffirait aussi à le faire disparaître. Nous serions ainsi heureux en ne le sachant pas. J'en doute pour une simple raison : on sait très bien lorsque l'on est malheureux. Personne ne le contestera. Pourquoi en serait-il autrement avec le bonheur ? Peux-t-on aussi se satisfaire d'un état sans en avoir conscience ? D'autres estiment que le bonheur n'est accessible qu'à la condition de vivre totalement l'instant présent. Ce serait en quelque sorte un bonheur par défaut, sans passé ni avenir. Comme si le souvenir et l'espoir épuiseraient toute possibilité d'être heureux. Pourtant, la mémoire ne charrie pas que des regrets et des remords. Quant à l'avenir, il sait aussi être prometteur. Puis, qui est capable de laisser à la demande son passé et son avenir sur le bas côté pour que seul le présent demeure ? Nous pourrions également rétorquer que le présent n'est qu'une frontière imaginée entre passé et futur, et qu'ainsi il n'existe pas. Toujours à propos du bonheur, d'autres encore affirment qu'il survient une fois que le malheur se tait. Ils oublient un peu vite que l'on peut ne pas être malheureux tout en étant triste. Et puis c'est s'en remettre au hasard, au coup du sort, que d'espérer être heureux faute de malheur. On renonce ainsi à atteindre le bonheur en se contentant de l'attendre : on verra bien !

Le 29 janvier 2025

- 568 kms -

Le choix de plus en plus ne nous laisse aucun répit, aidé en cela par les nouvelles technologies. Jamais sans doute n'avons-nous autant été sollicités depuis que le monde est à portée de main. Notification. Alerte. Recommandation. Notre attention ne sait plus où donner de la tête, si ce n'est qu'il faut choisir. Consulter ou non ce qui est annoncé, donner ou pas son avis sur tout, supprimer ou conserver ce qui est reçu, renchérir ou jouer l'indifférence pour des propos malvenus, que de choix, encore et encore. Le choix nous attrape au collet et voici qu'il nous faut naviguer entre le vrai et le faux, le pour et le contre, le beau et le laid. Jamais n'avons-nous eu tant accès à l'information et pourtant nous nous radicalisons.  Comme si seules les voies possibles s'étaient rétrécies. Le choix est omniprésent et cependant il nous limite. Peut-être en nous étouffant nous contraint-il moins à trancher qu'à nous retrancher derrière quelques partis pris. Saturés de choix, nous nous accrochons à des positions fermes, sans retenue, pour finalement ne plus avoir à choisir. Cela est vrai une bonne fois pour toute, ou faux peu importe, l'essentiel n'est pas là. Enfin puis-je me reposer sur quelques certitudes. Tant pis si ce repos n'est pas réparateur puisqu'il endort plus qu'il ne vivifie. Au moins nous sentons-nous un peu moins fatigués. Et tant pis aussi pour la nuance.

Le 28 janvier 2025

- 562 kms -

Il y a bien plus de soi dans chaque chose que de chose en soi. C'est que l'on regarde ​avec l'esprit, moins avec les yeux. Le réel est ce qu'il est selon ce que l'on en pense. On peut voir d'une chose qu'une face, qu'un côté, nous n'avons aucune peine pour l'imaginer dans sa globalité. Pas besoin d'aller plus loin pour envisager ce qui se trouve derrière ce que l'on ne voit pas, la seule lumière de ce qui se présente à nous suffit. Est-ce là une tare de l'esprit ? Certainement pas, au contraire. Considérons qu'il s'agit d'une limite très précieuse. On y gagne grâce à elle un temps considérable. Imaginons qu'il faille saisir chaque chose dans ses moindres recoins pour s'en faire une idée, nous risquerions fort bien de nous perdre dans les détails. Ainsi, rien ne se fait sans approximation, sans interprétation. Sans cela, nous ne serions peut-être que tout juste sortis de nos cavernes, ou bien celles-ci se seraient définitivement refermées sur nous...Tout n'est qu'interprétation et c'est tant mieux. Si tout nous apparaissait qu'à l'état brut, sans marge ni erreur, l'art certainement n'aurait pas existé, ni le mystère qui en fait la beauté. Sans interprétation, point de liberté non plus. Ce n'est pas pour rien que la tyrannie refuse l'à-peu-près, honnit ce qui est vraisemblable, impose une vérité qui n'est pas interprétable. C'est parfois dans l'erreur que l'on résiste mieux.

Le 27 janvier 2025

- 562 kms -

On se dit tu, histoire de se rapprocher. Le vouvoiement il est vrai est impersonnel. Il s'applique par défaut lors de rencontres inopinées, ou durablement pour entretenir des rapports hiérarchiques. Le vouvoiement est pratique aussi pour ne pas se dévoiler. Ainsi, en acceptant de se dire tu, on réduit la distance pense-t-on. Est-ce bien toujours le cas ? Une fois le tutoiement accepté, très vite le je peut l'emporter sur le tu. Je fais ceci, je fais cela. Je suis comme ci, je suis comme çà. Le je parfois prend toute la place. Je te tutoie pour que j'y trouve mon compte. Est-ce alors la meilleure façon de se rapprocher quant on prétexte le tutoiement pour s'affirmer un peu plus ? Ne sommes-nous pas plus éloignés l'un de l'autre lorsque le tutoiement sert l'égotisme, contrairement au vouvoiement qui nous maintenait à égale distance ? Méfions-nous de toute tentative tutoyante qui finalement n'a rien de familier.

Le 26 janvier 2025

- 552 kms -

C'est ainsi et pas autrement. Rien n'y fait. On peste pourtant. On rage. On ne lâche pas l'affaire. On ne désarme pas bien que l'on soit impuissant. On y met toute notre volonté, toute notre énergie, tout notre coeur. Rien n'y fait. C'est comme çà et pas autrement. On se cogne au réel comme dirait Lacan. La révolte a certes besoin de résistances pour se nourrir. Mais à ce point, on peut dire qu'elle est bien servie avec le réel. Je m'insurge, je veux qu'il en soit différemment. Mon voisin que je ne supporte pas. Ma famille que je n'ai pas choisie. Mon chef qui n'a rien de grand, sauf la taille peut-être, tant son pouvoir le dépasse. Quand on veut, on peut ! Mais qui le premier a osé prononcer cette sottise ? Qui a fait passer la volonté pour un instrument de pouvoir sans lui donner les moyens ? Le renoncement n'est jamais très loin de ce que je veux. La révolte annonce bien plus les démissions à venir que des bouleversements. Je renonce après avoir tant protesté. C'est ainsi, rien n'y fait. Je m'enfonce dans la résignation...Un sursaut pourtant est possible. Le réel peut bien m'échapper, j'ai la capacité de me le représenter sans qu'il ait son mot à dire. Mon chef qui n'en fait qu'à sa tête et se tient prêt à en couper certaines, d'un regard je le mets à nu. Je lui arrache son statut, et ainsi m'apparaît-il comme un âne baté. Son pouvoir n'ayant rien de prestigieux, mon imagination suffit à le renverser. Ma liberté se joue ainsi dans mes représentations. Je ne change pas le réel mais ma façon de le vivre. En silence. Les révoltes sont d'autant plus fortes qu'elles sont discrètes.

Le 25 janvier 2025

- 547 kms -

Je marche seul. On connaît la chanson. Nul besoin de quiconque pour avancer, pour m'engager dans cette ruelle, pour m'assister dans ces chemins escarpés, pour défier cette pente qui une fois vaincue me laisse savourer ma récompense dans la descente. Je marche seul. Sans témoin ni personne ajoute la chanson. Mon pas est léger, les distances n'y résistent guère. L'entrain m'accompagne, et plus je m'éloigne, plus la route m'appartient. Je la possède sans la partager. Quiconque peut l'emprunter, nous ne sommes pas du même chemin. La route peut bien s'insurger, en se verglaçant, en s'armant d'obstacles rocailleux, ou en pactisant avec la pluie. Rien n'y fait. Je marche seul. J'avance. Ce n'est pas la route qui s'empare de ma trajectoire. Ce n'est pas elle qui me fait rebrousser chemin. Je marchais seul, j'avançais, puis soudain je sentis une gêne. Nul intrus dans la chaussure, nulle révolte du corps explique cela. Je marchais seul, et maintenant je me sens seul. Mon pas aussi léger fût-il il y a peu est de plus en plus lourd. Le chemin dès lors n'est plus qu'un trajet. La distance a repris ses droits. Ma solitude s'est emparée de mes jambes. L'enfer c'est les autres a dit un philosophe. Mais l'enfer est aussi pavé de bonnes intentions. Il me faut rentrer pour retrouver d'autres solitudes, pour être seul à plusieurs.

Le 24 janvier 2025

- 547 kms -

On verra ! La plus sage des paroles qui soit. Elle fait taire toutes les envolées métaphysiques, tout comme les religions. Elle étrangle aussi les idéologies. On verra ! Ainsi rien n'est dit à l'avance, rien n'est écrit non plus, rien ne s'impose. On verra ! Sage parole qui ne doit rien au fatalisme. Il n'est pas question de s'abandonner au moindre sort. Ce n'est pas de la nécessité à l'état brut. Je réfléchis, je décide, j'agis, et puis on verra. C'est admettre le réel sans le travestir d'idées préconçues, de croyances, d'injonctions qui ne m'appartiennent pas. On verra ! Sage parole donc, mais aussi message de liberté. Penser ainsi pour éloigner toute compromission. Je refuse de m'en remettre à ce qui serait décidé avant même que j'agisse. L'angoisse, l'absurde, le risque. Les motifs certes ne manquent pas pour rendre certain ce qui ne l'est pas. Ceci toutefois n'est pas gratuit. Ma liberté en souffre. On verra, bien mieux que tous les drapeaux claquant au vent pour affirmer des promesses qui ne sont que des ordres.

Le 23 janvier 2025

- 542 kms -

L'humeur est comme la rumeur. Elle nous emporte même si l'on ne sait d'où elle vient. Qu'elle soit bonne ou mauvaise, chagrine ou enjouée, légère ou pesante, le monde est tout autre. D'humeur alerte, de bon matin les opportunités se lèvent avec moi. Je suis prêt à les saisir. Aujourd'hui sera différent d'hier. Les projets se bousculent. Je tiens le gouvernail d'une main ferme, assurée, enthousiaste. Puis le lendemain, rien ne va plus. Une chape de plomb s'est abattue sur moi la nuit durant, en silence, comme la neige que l'on découvre à l'aube. Le monde a perdu l'innocence que je lui reconnaissais il y a quelques heures encore. Il va me falloir l'affronter mais je ne suis pas d'humeur à combattre. Heureusement les habitudes viennent à mon secours. M'en remettant à elles, je peux traverser la journée sans encombre. Puis un nouveau réveil efface mon humeur de la veille. Tout m'indiffère. Ni bonnes, ni mauvaises, les heures passent sans que je les retienne. Il n'en restera rien mais au moins suis-je tranquille. A chaque jour suffit sa peine dit-on. A chaque jour son humeur également. Les résolutions, aussi fermes soient-elles, ne l'influencent guère puisqu'elles sont prises selon l'humeur. Vais-je marcher aujourd'hui avec entrain, m'engager allègrement sur les chemins qui m'attendent ? Ou bien mes pas seront-ils lourds et trainants ? Je ne sais pas. Mon humeur ne m'a encore rien dit. Je me chausse. On verra bien.

Le 22 janvier 2025

- 536 kms -

La vie ne nous suffit pas. Il faut toujours qu'on lui ajoute quelque chose, en se projetant, en visant ce qu'elle n'est pas. On lui retire aussi ce qu'elle est, en regrettant. C'est ainsi que nous vivons, pris en étau entre espoir et déception. La vie ainsi passe et nous n'y sommes pas totalement. La pleine conscience n'y peut rien. Elle est un chant des sirènes de plus, avec la modernité en prime. Très vite comme Ulysse nous voici attachés au mât. Qu'est-ce donc qui prend ainsi toute notre attention, notre énergie, nos émotions ? Le sens peut-être. On le cherche là où il n'y en a pas. La vie n'a pas de sens et pourtant sans cesse on lui en prête. Pourquoi. Pourquoi. Pourquoi ! On a beau hurler, point de réponse. Il faut donc meubler. Ce n'est pas la nature qui a horreur du vide, c'est nous. Alors on espère puis désespère, on imagine et on croit. Et pendant ce temps la vie passe en silence. Que faut-il faire de mes nuits, que faut-il faire de mes jours se demandait Aragon. Au mieux peux-t-on tracer quelques chemins, et ainsi remplacer le sens par des directions. C'est déjà pas si mal. La marche est un bon exercice pour s'y entraîner. Elle évite de se cogner contre ce qui n'existe pas. Elle autorise à aller vers ce qui n'a aucun sens. Marchant, le superflu disparaît, les regrets et les projections s'épuisent. Le pas allègre, je vis au lieu d'exister ailleurs.

Le 21 janvier 2025 

- 531 kms -

L'opinion est pratique. Elle est à portée de main. Grâce à elle, il est possible d'avoir un avis sur tout. Nul besoin de savoir, de penser, de réfléchir ; l'opinion nous évite cette peine. En la reprenant à mon compte, je peux affirmer ce que je ne sais pas, ou contester sans être convaincu. L'opinion n'a pas besoin de conviction pour se diffuser. L'air du temps, la rumeur ambiante, les bruits dans les couloirs lui suffisent.  La technologie lui rend également bien service avec des caisses de résonance toujours plus puissantes. Ainsi, l'opinion brave les distances. Toujours plus loin, toujours plus vite, l'opinion ne connaît plus de limite. L'ignorance pour elle n'est plus un obstacle. Il est désormais possible d'avoir réponse à tout. Reconnaissons-lui un côté démocratique. Ce n'est pas pour rien d'ailleurs que toute réflexion lui résistant est rapidement considérée suspecte ou élitiste. L'opinion aplatit tout. Face au doute, elle affûte ses armes. C'est ainsi que sont apparus les éléments de langage. Ils lui donnent forme sans effort.

Le 20 janvier 2025

- 531 kms -

La mesure n'est jamais loin de toute chose. La taille, le poids, la profondeur la caractérisent. La mesurant, on pense mieux la connaître pour la posséder un peu plus. Ce ne sont toutefois que des conventions qu'on lui applique. Il y a certes des lois universelles reconnaissables par tous. Celles-ci n'en sont pas moins des représentations. Et comme toute représentation, elles sont destinées à disparaître. N'oublions pas que la terre fût plate avant d'être ronde. Une loi, aussi universelle soit-elle, n'a pas toute l'éternité devant elle. La Terre peut bien tourner autour du soleil longtemps encore, la rotation immuable qui les lie disparaîtra avec eux. Les lois sont également scientifiques selon l'espace et le temps. Retirez-leur ces deux dimensions, elles s'effondrent. Finalement, la mesure aussi universelle soit-elle n'en est pas moins relative. Pourtant, on lui accorde toute notre confiance, et de plus en plus notre attention. Jamais semble-t-il n'a-t-on autant mesuré qu'aujourd'hui tout ce qui nous entoure et rythme notre quotidien. Pourquoi pas. Nous disposons des outils pour cela. Le risque toutefois est de transformer toute mesure en objet de performance. Dès lors, le réel s'appauvrit en se trouvant ainsi réduit à des données chiffrées. Les yeux rivés sur le compteur, prêt à toujours faire plus ou mieux, les choses finissent par nous échapper.

Le 19 janvier 2025

- 525 kms -

Qu'est-ce donc qu'être en bonne santé si ce n'est en s'oubliant. Non pas qu'il s'agisse de ne plus penser à soi, de ne plus s'estimer ou de se détester, de ne plus avoir confiance en soi ou de se désespérer. L'oubli dont il est question ici n'emprunte rien à la personnalité. Au contraire. Jouer un rôle social, s'y complaire, implique d'être disponible à soi. Je peux difficilement m'exercer à être celui que je ne suis pas sans penser à moi. L'attention à soi et la tension de soi vis-à-vis d'autrui me soucient en conséquence. Toutefois, être à soi et pour soi parmi les autres nécessitent de sentir bien, donc de s'oublier, non la personne que je suis puisque je la construis, mais le corps qui me singularise. Je suis en bonne santé lorsque mon corps est silencieux. Je ne l'entend pas, ni ne le regarde. Chaque matin je l'aperçois dans la glace sans lui prêter un regard. Dès lors, serais-je en bonne santé à la condition d'ignorer une bonne part de moi-même ? Faut-il à l'inverse que mon corps se rappelle à moi, avec la douleur, pour me connaître un peu mieux ? S'agit-il de souffrir pour être un peu plus soi-même ? Je n'en ferais pas le pari. La maladie est une énigme pour celui qui la combat. Certes est-il possible d'en connaître les causes. Mais quel sens lui donner ? Sans réponse, la maladie et la souffrance qui la manifeste touchent ma raison d'être. En bonne santé, mon corps s'absente. Malade, mon corps m'est devenu étranger.

Le 18 janvier 2025

- 518 kms -

Le mystère est tant précieux que fragile. Précieux à plus d'un titre. Déjà, il nous apprend l'humilité. Plus j'essaie de le saisir, plus il s'enfuit, et me voici bien démuni. Je sais ce qui est mystérieux sans le connaître. Je comprend alors que tout ne m'est pas accessible, que des choses existent sans moi, que des univers sont indifférents à mon sujet. Le mystère est comme une caisse de résonance sans bruit. Il me renvoie à la figure mon ignorance. Voilà de quoi devenir humble ! En même temps, le mystère me donne de la force. En effet, sans se dévoiler, il m'autorise à l'imaginer. Avec le mystère, tout est envisageable. Son absence brille et me voici profitant de sa lumière. Rien ne manque non plus avec le mystère. Il y a toujours quelque chose qui l'entretient, un je-ne-sais-quoi qui certes ne dit rien mais me protège du néant. C'est ainsi que le mystère m'autorise à dessiner des espaces infinis, ce que me refuse toute certitude.

Précieux donc, mais aussi fragile. Les bavardages l'épuisent, le dogmatisme le condamne. Il est assez aisé de tordre le cou au mystère, non pas en le découvrant, mais en lui substituant quelques vérités soi-disantes révélées d'on ne sait où. La vérité est tranchante. Ce qui est vrai est unique ; le mystère lui est multiple. Préférons à la vérité ce qui est vraisemblable. Au moins le mystère y trouve-t-il encore une place. Rien n'empêche non plus d'aller plus loin, en le préservant. Il suffit pour cela d'y penser en silence.

Le 17 janvier 2025

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